« Est-ce que vous pensez vraiment que ma vie vaut le coup d’être racontée ? » C’est l’inquiétude que j’ai entendue à chaque première rencontre avec un candidat au récit de vie. En effet, la demande des proches réelle ou supposée peut se faire pressante : un besoin, une envie de savoir, de connaître mieux son parent par exemple. La personne qui confie son récit de vie doit donc faire face à de nombreuses craintes. La première d’entre elle, c’est de ne pas avoir de choses intéressantes à raconter, de ne pas être à la hauteur des attentes de ses futurs lecteurs. Pourtant, au fil des rencontres avec le biographe, les souvenirs reprennent formes et couleurs, des prénoms reviennent, des paysages, des odeurs ressurgissent. Et c’est tout un pan du passé qui passe de l’oral à l’écrit, qui s’inscrit dans la transmission pour donner un éclairage au présent et au futur.
Un professionnel à l’écoute
Découvrir l’histoire d’une vie racontée par celui-là même qui l’a vécue est toujours pour moi un grand enrichissement. La manière dont chacun laisse une trace de son existence, les actes qu’il ou elle a ou n’a pas posés, sont autant de source d’apprentissage. C’est aussi ce que j’essaie de transmettre dans le récit que j’écris. Bien évidemment, le respect des mots de l’autre, mais aussi de ce qui se cache parfois derrière l’absence de mots, sont très importants. Mon métier de biographe, c’est d’abord écouter et entendre la parole, traduire la mémoire qui s’exprime, mais non pas l’interpréter, sinon dans la langue de l’autre.
L’aventure de l’écriture biographique est jalonnée d’obstacles. J’aime utiliser l’image d’un chemin de campagne : on y trouve des creux, des bosses, des racines qui affleurent et parfois quelque grosse pierre qu’il convient ou non de déplacer pour mieux avancer. Et ce chemin, le récitant le parcourt avec.